60’, Belgique, 2015/ Production : AJC. En 1994, environ un million de Rwandais furent tués durant le génocide contre les Tutsis. Depuis deux décennies, les survivants vivent à nouveau ensemble. Il y a cinq ans, les cinéastes ont suivi, dans un village, le parcours de deux jeunes gens confrontés au fragile processus de réconciliation d’une société traumatisée. L’une qui recherche le meurtrier et le corps de son père. L’autre, fils de meurtrier, qui veut épouser une fille de l’autre « camp ». Filmé sur quatre ans, le film dresse le portrait sensible de Tharcisse et Benoîte, ces deux jeunes Rwandais tiraillés entre amour et haine, désir de vengeance et pardon.
65’, Russie, 2015/ Producteur : Kepler 22 productions
« Novosibirsk, Sibérie profonde. Un crématorium où l’absurde le dispute au comique. La mort qui réunit des gens que rien ne destinait à se croiser et moi, au milieu de tout cela, qui tente de l’apprivoiser. »
En se mettant elle-même en scène comme une sorte de Jacques Tati -petit caillou dans les chaussures de la règle social- , la cinéaste crée des scènes mi-burlesques, mi-documentaires surprenantes. Une réjouissante tragicomédie autour de la mort, ses rituels, ses travestissements et ses apparats.
39’, France, 2015/ Producteur : Stella Productions/ Mouvement
Corse. RN 198 Km 100. Aleria. Ici se tenait une cave viticole. En août 1975, elle fut le théâtre d’évènements tragiques : un groupe de militants autonomistes occupent la cave appartenant à un chef d’entreprise d’origine pied-noir. A leur tête, Edmond Simeoni, le fondateur de l’ARC. Leur but : dénoncer les escroqueries dans le domaine viticole. Bientôt, face à eux, l’armée est mobilisée. Ce jour là, deux gendarmes sont tués et un militant de l’ARC grièvement blessé. La cave a aujourd’hui disparue.
Mais cette place demeure un lieu symbolique de la naissance des revendications nationalistes dans l’île.
Ce lieu, aujourd’hui en mutation, attend d’être consacré. Km 100 interroge la mémoire de cet endroit au travers de l’observation du présent, par la voix de Maria Francesca Valentini, une jeune Corse qui n’était pas née en 1975.
En présence de la réalisatrice
111’, France, 2014
Producteur : Haut les mains productions
Sélection du festival Entrevues de Belfort 2014
En janvier 2011 en Egypte, les manifestations anti-gouvernementales rassemblent des dizaines de milliers de personnes dans les rues du Caire, tandis que les villageois des campagnes du Sud suivent les évènements de la Place Tahrir via leur écran de télévision et les journaux. Du renversement de Moubarak à l’élection et la chute de Mohamed Morsi, le film suit ces bouleversements politiques du point de vue de villageois de la vallée de Louxor. Une vision évidemment inédite de cette «révolution arabe ». Qu’avons nous vu, nous Occidentaux, de cet évènement survenu en Egypte ? C’est là l’un des aspects passionnants du film. L’autre étant le récit égyptien intime de ces mois de révolution. Entre espoirs et déceptions, le changement se fait attendre.
61’, France/Algérie, 2015
Production : Survivance & Haut les mains production
La nuit se prolonge sur les hautes steppes de l’Atlas. Après les guerres, sur une terre où résonne encore l’écho d’une menace, Lamine marche en compagnie d’un enfant autour de « la marre blanche ». Au gré des lieux traversés où le passé affleure, il nous conte son histoire, le long des ruines qui refleurissent… Surgissent, comme dans un cauchemar, des hommes en cagoules, des armes. L’homme a peur, d’une peur sourde qu’il a gardé au ventre depuis des décennies. L’enfant ne sait pas mais il comprend. David Yon a composé là une sorte de conte documentaire pour mieux rendre compte de ce qu’ont été les années noires (la décennie des années 90) pour le peuple algérien et leurs traces aujourd’hui.
27’, France, 2015 Producteur : Kidam. Festival du court métrage de Clermont-Ferrand. Festival international du film de Rotterdam The Tel Aviv LGBT International Film
D’une caméra intime et amoureuse, le réalisateur filme son amant en appartement. La couette, la vaisselle, les lectures, les discussions, nous entrons de plain pied dans les charmants détails de la passion. Très vite, l’image des départs de l’amant revient comme un leit motiv… Le temps est court pour attraper l’amour. Un amour qui vient d’Afrique et qui y retournera.
Un jeune amour, ancré dans d’importantes différences culturelles, peut-il exister dans la durée ? Printemps, documentaire instinctif, relate le parcours progressif de cet Amour. Il nous transporte dans un romantisme cru, ouvert à tous, vers une beauté absolue.
91’, France, 2015/ Producteur : E 2 P
Sélectionné au festival de Locarno en 2014 (prix de la Semaine de la Critique)
Suite à une bagarre qui tourne mal, Koumba, 20 ans, est expulsée au Sénégal, son pays d’origine. Arrivée en France à l’âge de 2 ans, elle avait négligé de demander la nationalité française à sa majorité.
La jeune Parisienne agitée se retrouve en 48 heures dans un village sénégalais perdu dans la brousse, loin de sa famille et de sa vie à Paris. Le cinéaste la suit dans son voyage et son installation au Sénégal, développant un rapport d’une grande proximité avec son « héroïne ». Il entreprend ici rien moins que le récit de cinq ans d’exil : du fait divers à l’épopée tragique. D’un premier exil à l’autre. Du Sénégal à la France et retour. Se dessine ici l’application concrète d’une loi. Se dessinent également les tourments engendrés par les aberrations législatives, les tourments d’une enfant trimballée d’un pays, d’une culture à l’autre. La personnalité explosive de Koumba n’est pas pour rien dans le cachet du film.
78’, France, 2015 /Producteur : Quark productions.
De septembre 2012 à mai 2013, la France s’enflamme autour du projet de loi ouvrant le mariage aux couples homosexuels. Pendant ces neuf mois de gestation législative, la sociologue de la famille Irène Théry raconte par téléphone à son fils les enjeux du débat, ses réflexions intimes, ses questionnements. En arrière-plan, elle vit sa propre vie de famille que filment Mathias Théry (le fils) et Etienne Chaillou, avec humour et intelligence. De ces enregistrements nait un cinéma d’ours en peluche, de jouets, de bouts de cartons.Portrait intime et feuilleton national, ce film nous fait redécouvrir ce que nous pensions tous connaître parfaitement : la famille. Mais une famille d’aujourd’hui : 40 ans après les bouleversements de mai 68, et à l’heure de nouveaux bouleversements avec l’irruption de nouveaux « ordres amoureux ».
Avant première en présence de Mathias Théry et d’Irène Théry
52’, France, 2014
Producteur : Mitiki
Urbex, l’exploration urbaine (ou Rubex) consiste à visiter des lieux, abandonnés ou non, difficile d’accès, souvent situés à la marge de l’espace public. Ne jamais dégrader les sites dans lesquels ils s’infiltrent fait partie des principes de ses pratiquants. A la manière dont on ouvre un vieux livre et qu’on le referme, ils ne volent pas, ne cassent rien mais s’offrent une dose de sensations fortes. Les deux réalisateurs se mêlent, caméra en main, à ces escapades sportives et philosophiques. De New York à San Francisco, ils suivent ces « explorateurs urbains » dans des lieux improbables. Pénétrer une centrale nucléaire désaffectée, escalader un gigantesque échafaudage… L’exploit n’est pas que sportif, qui provoque un étrange sentiment de vertige et d’angoisse devant ces monuments morts de la modernité américaine, de notre modernité.
100’, France, 2015
Producteur :Kepler 22 productions
Algérie
50 ans après l’indépendance et le départ de nombre de Français… Le réalisateur avait promis à son père de le ramener un jour dans le village de son enfance. Son ami, kabyle, lui aussi, aimerait retrouver, en Algérie, la tombe de son grand père. Les trois hommes entament alors un étrange voyage devant la caméra sensible de Cyril Leuthy : un père en quête de son enfance, un amant en quête d’un grand-père inconnu et un fils qui aspire à créer de nouveaux liens avec sa famille. Et il y a l’Algérie, celle d’hier et celle d’aujourd’hui. Journal intime, récit de voyage, bilan d’une éducation sentimentale, le film est un objet à plusieurs strates qui mêle intime et collectif, mélange quête identitaire et égarement, indépendance politique et héritage du colonialisme, espoir et déception… Un film sur « l’épaisseur de la vie » qui parle d’une réconciliation possible.
88’, France, 2014
Producteur : Archieball
En janvier 1972, Archie Shepp enregistra l’album Attica Blues en hommage au soulèvement de la prison d’Attica. Il revisite ce répertoire 40 ans plus tard. Nous le suivons, avec 25 exceptionnels musiciens, à travers des jours de répétitions intenses, jusqu’au concert d’ouverture à Paris. The sound before the fury entrelace le récit des répétitions et celui de la rébellion (images d’archives, interviews d’époque), nous découvrons l’histoire des rebelles d’Attica, de leur révolte et de leurs espoirs. Nous sommes témoins de la détermination de Shepp à transmettre, au-delà des notes, le sens et le sentiment de sa musique. Nous découvrons les liens, certains intimes, que les musiciens ont avec les évènements d’Attica.
83’, France, 2014
Producteur : Jvdw film
Distributeur : Aloest distribution
Sélection : festival international de Rotterdam
« Un émouvant road-movie à travers l’Europe pour apprendre à … aimer. » dit le dossier de presse. Est-ce bien pour apprendre à aimer ou alors pour reprendre l’histoire – les histoires- au début, aller vérifier de quoi il s’agissait exactement, et comment le temps a fait son œuvre sur les anciennes amours… ?
Mêlant archives filmiques de ses amours de jeunesse, images de retrouvailles aujourd’hui avec ses « ex », et évocation de sa tumultueuse relation avec Rogier, la réalisatrice dresse un vivant état des lieux de sa vie amoureuse non dénué d’autodérision. L’intérêt de ce constat intime est qu’il se situe en « mitteleuropa » dans les années qui ont vu tomber le mur. Tatajana l’avait depuis longtemps franchi allègrement par amour. Les murs, l’amour, l’histoire d’une vie.
LE 18ème CORSICA.DOC: UNE EDITION MAJEURE
Le cinéma est un art jeune, et c’est un regard neuf qu’il porte sur les animaux. Non pas celui qui fut celui de la peinture, empreint de religion, de mysticisme ou de mythologie. Non, c’est un regard profondément troublé que porte les cinéastes sur les « non-humains », prolongeant en cela les interrogations des jeunes philosophes d’aujourd’hui. C’est, modestement, que nous esquisserons cette histoire d’un rapport Homme/Animal par les films choisis ici, en écho aux tableaux du Palais Fesch d’Ajaccio.
Les films de la compétition, eux, ne témoigneront pas moins des graves questions qui traversent notre temps. La guerre, la famille, la vieillesse… les jeunes cinéastes font feu de tout bois pour réaliser de puissants gestes cinématographiques.
Une arche de Noé cinématographique
par Federico Rossin
« Si aujourd’hui nous n’observons plus les animaux, eux n’ont pas cessé de le faire. Ils nous regardent car nous avons, depuis la nuit des temps, vécu en leur compagnie. Ils ont nourri nos rêves, habité nos légendes et donné un sens à nos origines. Ils portent à la fois notre différence et la trace de ce que nous croyons avoir perdu. »
John Berger, Pourquoi regarder les animaux ?
Cette programmation est une traversée à la fois ludique, pensive et visionnaire autour de l'univers des animaux, elle interroge et réactive la relation entre l’homme et l’animal, le lien qui au fil de l’histoire se voit transformé par les nouveaux rapports de production du XX e siècle, réduisant l’animal à l’état de bête avant d’en faire un simple produit de consommation. Mais une nouvelle conscience de la relation entre nous et les animaux commence à émerger depuis quelques années. Et comme toujours le cinéma est un merveilleux miroir pour comprendre notre société par le prisme de son imaginaire et de son esthétique.
Le parcours des séances est une surprenante Arche de Noé cinématographique dans laquelle le public ajaccien pourra faire à la fois une expérience de découverte et de partage. Si Werner Herzog interroge radicalement notre anthropomorphisme dans son Grizzly Man (2005), Frederick Wiseman avec son Zoo (1993) nous plonge dans un microcosme animal reconstruit artificiellement, en miroir ironique et impitoyable de notre société. Barbet Schroeder, dans son Koko, le gorille qui parle (1978), dresse un portrait drôle et terrible de notre fantasme d'omnipotence scientifique et éthique sur le monde animal. Roberto Rossellini a réalisé India (1959) de manière expérimentale : le résultat est une éblouissante tentative de décrire la relation durable et fructueuse entre les hommes et les animaux (éléphants, tigres, singes), à travers une structure à épisodes imprégnée d'une profonde empathie: un film qui nous réconcilie avec la Terre Mère (Matri Bhumi) et nous met au même niveau que tous les êtres vivants.
La distance qui nous sépare des animaux
par Olivia Cooper-Hadjian
Les cinéastes ici cités prennent le parti d’adopter vis-à-vis de l’humain une distance à la mesure de celle qui nous sépare des autres animaux. Les bêtes y conservent tout leur mystère, et nous regagnons une partie du nôtre. Car n’est-il pas étrange d’envoyer des chiens dans l’espace ou d’imbriquer de minuscules insectes dans de grandes machines de pointe pour tenter de percer le secret de leur cognition, et peut-être de leur conscience ?
Si l’exploitation n’est pas absente de ces démarches, ces cinéastes la déjouent par leur geste et rétablissent un lien avec l’animal en se mettant physiquement à sa place : Elsa Kremser et Levin Peter suivent le parcours d’une meute de chiens errants, adoptant leur cadence, dans Space Dogs ; Maud Faivre et Marceau Boré montrent la solitude des insectes scrutés dans Modèle animal. Certains rapports sont plus ambigus, comme le montre Homing, où le dérèglement de l’environnement éveille un effort de réparation par des actes de soin.
Le respect qu’imposent les bêtes se mâtine d’envie, jusqu’à l’absurde : on s’imagine échapper à notre propre condition, en tentant d’imiter leurs talents musicaux dans Langue des oiseaux d’Érik Bullot, ou en s’identifiant à leur pouvoir de séduction dans Los que desean d’Elena López Riera.