LES FILMS DE LA THEMATIQUE "LES INDEPENDANCES... ET APRES" 

Au lendemain de la libération du Mozambique en 1975, le président de la toute nouvelle République invite le cinéaste français Jean Rouch à venir « filmer l’indépendance ». Celui-ci viendra tourner le court métrage Makwayela mais surtout il créera sur place un atelier de formation au cinéma super 8 pour les Mozambicains. Ce sera la genèse des Ateliers Varan, voués à générer une cinématographie propre à ces pays en voie de décolonisation. Une démarche emblématique de ce vaste mouvement artistique engagé dès le milieu du XXème siècle contre l’impérialisme et le colonialisme.

 

Cette tentative de reconquête de la représentation de son histoire, on la retrouve en Algérie quand le nouveau gouvernement algérien finance en 1965 le film La bataille d’Alger. Quand le cinéaste cubain Santiago Alvarez fonde l’Institut de cinéma à La Havane, dirige les Actualités, dont le fameux 79 Primaveras, qui sont autant de brûlots contre la propagande états-unienne. Quand le cinéaste sénégalais Ousmane Sembene saisit la perpétuation d’une géographie néo-coloniale dans la capitale Dakar (Borom Sarret). Ces cinématographies cherchent à renverser le regard porté jusque là, cherchent de nouvelles formes, cherchent à former un nouveau public : « plus critique, plus complexe, plus informé, plus exigeant, plus révolutionnaire », comme le proclame Santiago Alvarez.

 

 

Au cœur du monde occidental l’onde de choc des indépendances n’est pas moins forte et de nombreux cinéastes s’en font l’écho. Dès 1953, Chris Marker et Alain Resnais réalisent Les statues meurent aussi, un éloge de l’art africain et une dénonciation du colonialisme, longtemps interdit de projection. Joris Ivens en 1960 filme un village malien à l’heure de la décolonisation (Demain à Nanguila). William Klein et toute une équipe de cinéastes et techniciens filment les 15 jours fous de fête des indépendances à Alger en 1969 (Festival panafricain d’Alger).

Les décennies qui suivent feront place à un regard plus critique (Tahia y a Didou de Mohamed Zinet en 1971), mélancolique (Mémoire 14 d’Ahmed Bouanani 1971).

 

Cinquante ans plus tard, une jeune artiste algérienne, Katia Kameli, réalise un essai, Le roman algérien,expliquant : « il était temps de questionner les Algériens sur leur relation à l’histoire et à sa représentation ». Jusqu’à aujourd’hui, des films de jeunes réalisateurs, empreints de questionnements, poursuivent donc ce long travail de réappropriation: Talking about trees de Suhaib Gasmelbari, Ils brûlent encore de Felice d’Agostino/Arturo Lavorato, la Fièvre de Safia Benhaïm…

Pour tous, il s’agit de réécrire, d’écrire en images, le roman d’un pays.